Finance et pandémie, une relation particulière

L'importance de l'exercice des options dans le financement de la recherche face à la COVID-19

Par Dominique Jacquet

Une étude qui vient d’être publiée par l’International Journal of Infectious Diseases fait état de plus de 30 molécules testées sur environ 120 molécules candidates au traitement de la COVID-19.

 

Certaines ont été des candidates décevantes, d’autres sont utilisées avec succès dans le traitement d’autres maladies virales. Toutes ont en commun d’être antérieures à l’apparition de la COVID-19.

 

Mobiliser la finance pour parler du traitement d’une pandémie peut apparaître dérisoire, mais vous allez constater que les conclusions que je vais tirer de ces quelques lignes ne le sont pas !

 

Les groupes pharmaceutiques qui ont investi dans le développement de ces molécules n’ont pas pris en compte l‘émergence d’un virus qui n’existait pas (encore). Ils ont investi des fonds afin de répondre à un besoin exprimé, en l’occurrence l’élaboration d’un traitement efficace contre une pathologie identifiée. Mais, ce faisant, ils ont construit un capital immatériel, une capacité technique, éventuellement protégée par un brevet, permettant potentiellement de répondre à un besoin difficile à prévoir.

 

Cet investissement est d’une toute autre nature que la traditionnelle acquisition d’une machine permettant de fabriquer un produit répondant à un besoin et s’amortissant par son utilisation. L’investissement « matériel » fait l’objet d’une évaluation financière qui s’appuie sur un principe éprouvé : il faut que cela rapporte plus que cela ne coûte (la VAN doit être positive pour les financiers !) … Or, ce processus d’évaluation néglige (très souvent…) la mobilisation potentielle ultérieure du capital humain et technologique créé par le projet au-delà de sa propre exécution.

 

Ce capital s’appelle une option et c’est bien l’exercice de ces options que constituent les médicaments testés en ce moment.

 

La modélisation mathématique confirme ce que suggère l’intuition : ces options ont d’autant plus de valeur qu’elles sont pertinentes dans un monde d’incertitude probablement croissante. Par contre, une mobilisation peu adaptée de l’outil mathématique (cf. notre vidcast de juillet 2019 consacré au concept d’option réelle appliqué à un projet de R&D chez Gilead) n’est pas plus utile qu’une actualisation court-termiste de cash-flows.

 

Il faut, donc, dépasser la seule prise en compte de bénéfices identifiés dans l’allocation des ressources, surtout dans l’investissement immatériel (technologie, compétences, etc.) que les cash-flows ont tant de mal à appréhender.

 

Il faut plus de stratégie et d’économie dans les processus d’évaluation financiers.