“Oldies but Goldies”

Ford et les valeurs sûres

Par Dominique Jacquet

 

Le titre de la première compilation des Beatles publiée en 1966 évoque irrésistiblement l’industrie automobile.

 

En annonçant le doublement de ses prévisions de vente du pick-up iconique F-150 dans sa version électrique (EV) Lightning, Ford (classée « vieillerie » dans la compilation des constructeurs) a vu son cours de bourse instantanément augmenter de 10%. Volvo Cars (notre film de décembre 2021), capitalisant sur son engagement tout-électrique en 2030 a vu son cours progresser de 6% dans la foulée.

 

Par contre, les acteurs plus récents du segment EV ont été pénalisés par cette annonce. Lucid et Tesla ont chuté de 5%, Rivian de 10%. Alors, évidemment, lorsque Ford se valorise de 10%, cela représente 10 milliards de dollars US. Lorsque Tesla chute de 5%, le montant s’élève à 50 milliards et il n’est pas évident qu’il s’agisse d’un transfert de valeur d’un actionnaire à l’autre.

 

Il reste pour Ford à transformer l’essai. Certes, le marché considère probablement que fabriquer des voitures depuis près de 120 ans et être à l’origine d’une théorie industrielle historique ne constituent pas nécessairement un handicap pour développer avec succès une gamme électrique et appartenir à la catégorie des « goldies ». Mais, remplacer un moteur thermique par son homologue électrique n’est pas une révolution, encore moins une destination.

 

Si Rivian et Lucid valent toujours chacune 70 milliards de dollars en bourse (Ford : 100 milliards), ce n’est pas en raison du volume considérable de leur production automobile (2021 : 1.015 ventes pour Rivian, les livraisons ont débuté en novembre pour Lucid), mais plutôt pour leur capacité à concevoir le véhicule dans un système numérique complet. Dans cet esprit, d’autres constructeurs « oldies » négocient des accords avec Amazon ou Waymo relatifs à la distribution ou la mobilité.

 

Se limiter au remplacement du moteur, ce qui n’est vraisemblablement pas l’intention de Ford, c’est baigner dans un océan rouge suivant la théorie bien connue. Mais, l’océan (réputé) bleu de la mobilité numérique va demander des investissements en capital humain, une vision systémique et un talent d’innovation considérables.

 

Alors, si l’une des compilations des Beatles portait le titre (aujourd’hui particulièrement pertinent…) « Tomorrow Never Knows », la dernière phrase de cette chanson était : It’s just the beginning… Quelle vision économique chez les Fab’ Four !

 

Toute l’équipe de la Ecademy vous adresse ses meilleurs vœux de santé, de bonheur et de mobilité pour 2022.