Acheté – vendu
Michael Dell et l'inélégance financière
Par Dominique Jacquet
Michael Dell est bien connu … pour avoir suggéré à Steve Jobs de rendre leurs fonds aux actionnaire d’Apple en 1997 alors que la firme était au bord du gouffre : l’élégance en personne. En 1997, la société Dell générait des revenus de 12 milliards de dollars et valait 36 milliards en bourse. Un peu plus tard, en 2013, Michael Dell, via un LBO, rend leurs fonds aux actionnaires (de Dell) à hauteur de 24 milliards après en avoir assuré à nouveau la direction les 7 années précédentes (vaches maigres…) : bravo l’artiste.
Peu après l’ « épisode Apple », en 1998, la société VMware est créée par des étudiants de Berkeley, puis achetée par EMC en 2003 pour 625 millions de dollars. EMC va introduire 15% du capital de VMware en 2007 au cours de $85. Après avoir atteint un « plus haut » supérieur à $200 en 2019, le cours va graduellement baisser pour atteindre le niveau de $95 début mai puis remonter à $115 aujourd’hui.
Afin de revenir en bourse sans franchir les étapes délicates de l’IPO traditionnel, Dell prend le contrôle d’EMC, société déjà cotée, en 2016 pour 67 milliards de dollars. Aujourd’hui, on utiliserait plutôt un SPAC… Le cours de VMware est alors positionné à $79 par le marché.
En novembre 2021, Dell se sépare de VMware, après versement par cette dernière d’un dividende exceptionnel de 12 milliards de dollars, par le biais d’un spin-off, distribuant sous la forme d’un dividende spécial les actions de VMware aux actionnaires de la firme. VMware va théoriquement poursuivre sa route de manière autonome avec des revenus qui croissent (de 8 milliards en 2017 à 13 milliards en 2021) et une rentabilité opérationnelle suffisamment stable pour justifier un ß de 0,8 : de novembre 2021 à juin 2022, le cours de VMware a perdu un peu moins que le Nasdaq qui abandonnait près d’un-tiers de sa valeur sur la même période.
Michael Dell possède 41% des actions de VMware après scission.
Mais, l’histoire n’est pas finie car Broadcom, après avoir essuyé quelques refus de la Maison Blanche, a désormais l’autorisation d’acquérir VMware pour 61 milliards de dollars. Cette offre, qui suit les acquisitions de CA Technologies et Symantec (pour un total de près de 20 milliards de dollars) et est « non-sollicitée » aux dires de Michael Dell, est largement soutenue par ce dernier qui va récupérer une partie des pertes boursières de ces derniers mois. Michael restera dans l’Histoire comme l’inventeur d’un système de supply chain très innovant et qui va assurer un avantage concurrentiel déterminant à sa firme. Mais, comme le suggère un ancien de la firme, on peut ajouter sans prendre de risque que « Michael is a creative financial genius ».