Zoom, risque spécifique ou systématique ?
Une analyse de la situation de l'entreprise de télé-conférence
Par Dominique Jacquet
Ce n’est certainement pas l’annonce, le 5 décembre 2019, des résultats du 3ème trimestre 2019 qui a propulsé l’action de Zoom vers les sommets. Le quasi-doublement du chiffre d’affaires et de la marge brute est entièrement consommé par l’augmentation corrélative des dépenses d’exploitation, notamment commerciales, et le résultat d’exploitation est stable, légèrement négatif.
Depuis sa mise en bourse, mi-avril 2019, Zoom a connu une trajectoire « traditionnelle » pour une société technologique : un ß élevé, voisin de 2, suivi d’une perte de corrélation significative par rapport au marché, avant d’envisager le démarrage d’une trajectoire stabilisée. Vous vous rappelez que le ß traduit économétriquement la corrélation d’un titre boursier par rapport à l’indice de référence (le Nasdaq en l’occurrence) et économiquement la sensibilité de la firme aux conditions macroéconomiques.
Le premier graphe montre l’évolution du Nasdaq et de Zoom depuis la mise en bourse de cette dernière.
Graphe 1 : Zoom et Nasdaq avril 2019-mars 2020
Le second, conséquence directe du premier, est le ß de Zoom calculé sur base hebdomadaire et sur une période glissante de 2 mois.
Graphe 2 : ß (hebdomadaire, 2 mois glissants) de Zoom
Même si les deux firmes sont très différentes, la trajectoire boursière de Zoom ressemble à celle de Facebook qui perdit rapidement 30% de sa valeur pour retrouver son cours d’introduction après 8 mois de cotation. Comme Facebook, Zoom a connu une période à ß négatif. Ceci ne traduit, à l’évidence, pas une prime de risque négative, mais bien une trajectoire de nature spécifique : le Nasdaq monte, Zoom descend, le ß est négatif… Puis, Zoom reprend des couleurs et le Nasdaq poursuit sa montée, alors le ß devient stratosphérique… Le constat est intéressant, mais est purement économétrique.
Le phénomène le plus remarquable est constaté depuis 7 semaines environ. L’évolution du COVID19 n’a pas encore produit ses effets sur les places boursières, la chute des bourses ne démarrant que le 21 février. Par contre, Zoom va voir son cours progresser de $70 le 27 janvier pour atteindre un pic de $125 le 5 mars, avant de retomber à $107 le 13 mars. Isolement forcé ou volontaire, télétravail et limitation des contacts ont montré le formidable outil que constituait la vidéoconférence et Zoom, parmi d’autres, a conquis sa crédibilité d’affaires auprès des clients comme des marchés.
Que va-t-il se passer maintenant ? La société vient de publier (4 mars) ses résultats du 4ème trimestre : forte progression des ventes, résultat d’exploitation positif, génération de trésorerie significative… et $10 de plus dans le cours de bourse, immédiatement perdus dans le sillage du Nasdaq. Après une remontada de nature individuelle et, donc, spécifique, la trajectoire de Zoom va-t-elle devenir collective et systématique ? Avec quelle sensibilité dans le long terme ?